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Mot de passe perdu?

Dans La Vague

En 1992, le ministre canadien des Pêches et Océans a décrété un moratoire sur la morue du Nord, causant l’effondrement immédiat de 12 % de l’économie de Terre-Neuve et touchant de façon disproportionnée les petits villages de pêche côtiers. Depuis, un bon nombre de personnes ont pu survivre en combinant des activités de pêche grandement réduites, de l’aide financière du gouvernement et des emplois en haute mer ou à l’extérieur de la province, mais aucune de ces solutions n’est durable ou viable à long terme. Dans cette région, l’aquaculture en mer (qui prend la forme de pisciculture en cages) a permis de créer des emplois stables, mais la géographie de la région n’est pas propice à ce type d’aquaculture et les villages sont loin d’être des emplacements idéaux.

Mais quelle ressource retrouve-t-on en abondance dans la région? Des vagues… et donc de l’énergie! En exploitant cette énergie houlomotrice pour pomper de l’eau jusqu’au rivage à bas prix, on peut surmonter les défis géographiques qui mettent un frein à la croissance de l’industrie aquacole en mer et favoriser le développement d’une aquaculture côtière profitable qui entraînera de nouveaux emplois et une croissance économique à long terme dans ces collectivités.

C’est dans l’esprit de cette solution que le Collège de l’Atlantique Nord s’est décidé à relever l’important défi de l’aquaculture côtière. Au cours des six dernières années, une équipe du collège a transformé le Wave Environment Research Centre (centre de recherche environnementale sur les vagues, ou WERC) à Lord’s Cove, sur la côte sud de l’île de Terre-Neuve, en un important moteur économique. Le centre, dirigé par M. Mike Graham, compte maintenant cinq employés à temps plein. Il a aussi permis d’offrir 375 semaines d’emploi à des étudiants, des formations à plus de 200 étudiants ainsi que 12 stages.

Le projet comporte trois éléments technologiques clés : la pompe à eau de mer (NMT 7), la ferme aquacole (NMT 9) et l’établissement d’exposition à l’océan et d’essai des instruments (NMT 9). Par l’entremise du programme de mobilisation en faveur de l’innovation, Springboard Atlantic a facilité la mise sur pied de ces trois éléments. Cette mesure de financement qui est financé par l’Agence de promotion économique du Canada atlantique a aussi permis d’appuyer des activités de participation de l’industrie et de mener une étude de marché sur la pompe à vagues, qui s’est avérée un outil précieux pour cerner les avenues de commercialisation possibles. Les trois composantes du projet sont presque prêtes à une mise en marché à pleine échelle.

Le WERC continue de travailler pour atteindre son objectif ultime de commercialisation à pleine échelle de l’aquaculture côtière, mais l’on constate déjà les importantes retombées de ses efforts sur l’économie locale. En effet, sous la direction du bureau de la recherche appliquée et de l’innovation du Collège de l’Atlantique Nord, le WERC a rapporté 4,7 millions de dollars à la région, dont la moitié a été investie dans les ressources humaines et divers biens et services dans la péninsule Burin. En outre, le centre a travaillé auprès de huit entreprises, soit trois multinationales, trois entreprises dont le siège social est au Canada et deux entreprises en démarrage, pour les aider à résoudre certains défis techniques.

Comme c’est souvent le cas dans ce type de projet, les répercussions indirectes sont difficiles à mesurer, mais elles sont parfois encore plus éloquentes que les répercussions directes. À mi-parcours dans le projet, des pêcheurs de homard de la région ont demandé à M. Graham s’ils pouvaient mettre leurs prises dans les bassins inoccupés du WERC. L’un de ces bassins a fini par devenir un vivier à homards saisonnier, et puisque d’autres espèces se retrouvent souvent dans les casiers à homards, les pêcheurs ont commencé à amener de « curieuses bestioles » pour les mettre dans un autre des bassins inoccupés. Le résultat : un bassin de manipulation qu’on peut visiter depuis déjà trois ans et qui jouit d’une grande popularité auprès des touristes et des élèves des écoles locales. Le WERC a compté 200 visiteurs lors de la première saison d’exploitation du bassin de manipulation, un nombre qui a grimpé pour atteindre 1 600 visiteurs dans la troisième année. De plus, cette initiative s’est effectuée sans marketing ou dépense supplémentaire. Les pêcheurs continuent d’ajouter des espèces au bassin, et les entreprises locales profitent du nombre accru de touristes dans la ville.

Bref, bien que le défi considérable posé par l’instabilité économique issue du moratoire sur la morue soit loin d’être surmonté, la résilience de ces collectivités rurales et le leadership manifesté par le WERC et le Collège de l’Atlantique Nord prouvent que l’innovation peut bel et bien émerger de n’importe où et engendrer des retombées insoupçonnées.